Newsletter trimestrielle n°24

A l’issue du dernier trimestre de l’année 2023 et des premiers jours de cette nouvelle année, le cabinet vient présenter de nombreuses décisions publiées qu’il a obtenues dans des affaires traitées en toute matière et, tout particulièrement, en matière procédurale (arbitrage, saisine d’une juridiction, mentions de l’acte d’appel, effet interruptif de prescription…).

Cette newsletter commente de manière synthétique ces arrêts qui ont justifié une publication au Recueil Lebon ou au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation, ou présentent, dans tous les cas, un intérêt juridique et pratique.

Droit Civil

Protection des consommateurs – démarchage et vente à domicile – droit de rétractation – professionnel – conditions – objet du contrat n’entrant pas dans le champ de l’activité principale

Civ 1, 20 décembre 2023, n°22-18.025

Dans cet arrêt, la première Chambre civile de la Cour de cassation précise les conditions dans lesquelles les dispositions du droit de la consommation relatives aux contrats hors établissement peuvent s’appliquer aux contrats conclus entre deux professionnels.

L’article L. 121-16,1, III du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016, devenu, en substance, l’article L. 221-3 du code de la consommation, réserve leur application aux « contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq ».

Ce texte est venu poser un nouveau critère, celui du contrat n’entrant pas dans le champ de l’activité principale du professionnel, supplantant le critère précédemment retenu, qui était celui du contrat n’ayant pas de rapport direct avec l’activité du professionnel (cf. article L. 121-22 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014).

La Cour de cassation censure en conséquence la cour d’appel qui, pour écarter l’application de ces dispositions, avait retenu que le contrat de maintenance et de location du photocopieur litigieux portait sur du matériel de reproduction nécessaire à l’activité administrative et commerciale de la société locataire et que celle-ci avait certifié dans le contrat que le bien loué était destiné exclusivement à des fins professionnelles.

La cour d’appel devait « rechercher si l’objet du contrat de location entrait dans le champ de l’activité principale du locataire ».

Autrement dit, le seul fait que le contrat ait été conclu à des fins professionnelles et soit utile à l’activité du professionnel ne suffit pas à exclure l’application des dispositions du droit de la consommation relatives aux contrats hors établissement.

La Cour de cassation veille ainsi à ce que le changement de critère opéré par le législateur soit effectif (v. déjà, dans le même sens : Civ 1, 31 août 2022, n°21-11.455, publié au bulletin ; contra, Civ 1, 29 mars 2017, n°16-11.207, qui pouvait laisser penser que la modification du critère légal ne serait pas suivie d’une modification de jurisprudence).

Droit du Travail

Contrat de travail – rupture – licenciement – cause – cause réelle et sérieuse – applications diverses – travailleur étranger – carte de résident – deux mois précédant l’expiration du titre de séjour – demande de renouvellement – délai – défaut – portée

Soc. 29 novembre 2023, n° 22-10.004, publié au Bulletin

Dans cette affaire, la Cour de cassation a réaffirmé sa solution déjà consacrée tendant à juger fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement d’un salarié pour défaut d’autorisation de travail, lorsque ce dernier, avant son licenciement, n’a pas justifié auprès de son employeur de ce qu’il a effectivement entrepris des démarches auprès de la préfecture en vue du renouvellement de son titre de séjour dans le délai imparti (Soc. 20 mars 2013, n° 11-19.469 ; 17 novembre 2021, n° 20-11.911).

Après avoir rappelé qu’il résulte des dispositions du 2ème alinéa de l’article L. 311-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa version applicable au litige ante´rieure a` la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018, qu’entre la date d’expiration de la carte de résident et la décision prise par l’autorité administrative sur la demande de renouvellement, dans la limite de trois mois à compter de cette date d’expiration, l’étranger peut justifier de la régularité de son séjour par la présentation de la carte arrivée à expiration et conserve pendant cette période son droit d’exercer une activité professionnelle, et de celles de l’article R. 311-2, 4°, du même code, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-141 du 27 février 2019, que l’étranger qui séjourne déjà en France présente sa demande de renouvellement de sa carte de séjour dans le courant des deux derniers mois précédant l’expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s’il est titulaire du statut de résident de longue durée-UE accordé par la France en application des articles L. 314-8, L. 314-8-1 et L. 314-8-2, la Haute juridiction a jugé qu’il résulte de la combinaison de ces textes qu’un étranger, titulaire d’une carte de résident, doit, pour bénéficier du délai de trois mois lui permettant, après expiration de son titre, de conserver son droit d’exercer une activité professionnelle, en solliciter le renouvellement dans les deux mois précédant cette expiration.

Ainsi, selon la Chambre sociale, la cour d’appel qui, pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, après avoir constaté que le salarié était titulaire d’une carte de résident valable jusqu’au 2 janvier 2017, énonce, d’une part, qu’en application de l’article R. 5221-3, 1°, du code du travail, dans sa version applicable au litige, la carte de résident, délivrée en application de l’article L. 314-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, constitue le premier des documents visés constituant une autorisation de travail et qui « permet l’exercice de toute activité professionnelle salariée » et que le salarié était titulaire d’un tel document valant autorisation de travail, et, d’autre part, qu’en vertu de l’article L. 311-4, alinéa 2, du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction en vigueur du 1er novembre 2015 au 1er mars 2019, une disposition réglementaire ne pouvant limiter les droits, ainsi reconnus par la loi, au salarié titulaire d’une carte de résident, la nature du titre de séjour dont bénéficiait le salarié lui permettait de continuer l’exercice de son activité professionnelle jusqu’au 2 avril 2017, sans avoir à justifier auprès de son employeur d’une démarche réalisée pour en obtenir le renouvellement, ce dont elle a déduit que le salarié ne se trouvait pas en situation irrégulière et que l’obligation faite par l’article R. 311-2, 4°, du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile au salarié sollicitant « le renouvellement d’une carte de séjour permettant l’exercice d’une activité professionnelle » dans le courant des deux derniers mois précédant l’expiration de la carte de séjour dont il est titulaire ne s’appliquait pas à sa situation, a violé les articles L. 311-4 et R. 311-2, 4° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans leur version applicable au litige.

Sécurité Sociale

Sécurité sociale – assurances sociales – prestations (dispositions générales)

2ème civ. 30 novembre 2023, nos 21-24.899, 21-24.900, 21-24.901, le premier publié au Bulletin

Dans ces affaires, la Cour de cassation a rappelé, d’une part, qu’il appartient à l’organisme social qui engage une action en répétition de l’indu fondée, en application de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, sur la méconnaissance des règles de tarification et de facturation fixées par l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, d’établir l’existence du paiement et son caractère indu et que dès lors que l’organisme social établit la nature et le montant de l’indu, il appartient au professionnel de santé de discuter les éléments de preuve produits et d’en apporter la preuve contraire, d’autre part, que conformément à l’article 1358 du code civil, la preuve peut être rapportée par tout moyen, et, de troisième part, qu’il résulte de l’article 23.2 de la nomenclature générale des actes professionnels annexée à l’arrêté du 27 mars 1972 modifié que la prise en charge des soins inscrits au titre XVI à un patient en soins palliatifs, réalisés à domicile, donne lieu à la majoration de coordination infirmier (MCI) et que la prise en charge en soins palliatifs est définie comme la prise en charge d’un patient ayant une pathologie grave, évolutive, mettant en jeu le pronostic vital, visant à soulager la douleur et l’ensemble des symptômes digestifs, respiratoires, neurologiques et autres, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage.

Elle a ensuite réaffirmé sa doctrine classique selon laquelle les juges du fond apprécient souverainement les éléments de preuve et de faits dont ils déduisent qu’une partie rapporte la preuve qui lui incombe, en l’occurrence la preuve par l’infirmier de la nécessité des soins palliatifs prodigués à son patient.

Ainsi, selon la 2ème Chambre civile, la cour d’appel, après avoir d’abord énoncé, d’une part, que la facturation de la MCI est sous la seule responsabilité de l’infirmier qui la facture dans la mesure où elle n’est pas prescrite par le médecin et, d’autre part, que la preuve du bien-fondé de la prise en charge en soins palliatifs se fait par tous moyens, ensuite relevé que la caisse se borne à soutenir que, sur les cinq patients pour lesquels l’infirmière a facturé les majorations litigieuses, plusieurs n’étaient pas en fin de vie, et enfin constaté que la professionnelle de santé produit aux débats les attestations établies par les médecins traitants de chacun des patients pour lesquels elle a appliqué la facturation des MCI, dont la fiabilité et la sincérité ne sont pas remises en cause par les éléments produits par la caisse, a estimé, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation que ses constatations rendaient inopérante, que la professionnelle de santé, établissant qu’il s’agissait de soins palliatifs, rapportait la preuve du bien-fondé de la facturation de la MCI, l’absence de production aux débats du dossier de soins infirmiers étant sans incidence sur la solution du litige.

Sécurité sociale – droit de l’Union européenne – généralités

Civ.2, 30 novembre 2023, n°21-18251, publié au bulletin

Dans cet arrêt de principe, rappelant d’abord que selon l’article 13, paragraphe 3, du règlement (CE) n°883/2004 du Parlement européen et du Conseil, la personne qui exerce normalement une activité salariée et une activité non salariée dans différents Etats membres est soumise à la législation de l’Etat membre dans lequel elle exerce une activité salariée et ensuite la procédure de dialogue entre les Etats membres, organisée par l’article 16 du règlement (CE) n°987/2009 du Parlement européen et du Conseil, la deuxième Chambre civile décide que lorsque la procédure de dialogue entre les institutions compétentes des Etats membres concernés, prévue à l’article 16 du Règlement n°987/2009 n’a pas été mise en œuvre, il appartient au juge saisi d’un conflit d’affiliation d’inviter l’institution désignée par l’autorité compétente à la mettre en œuvre.

Dès lors en l’espèce où elle était saisie d’un litige portant sur la détermination de la législation applicable à un cotisant qui invoquait une situation de pluriactivité (en exerçant une activité indépendante en France et une activité salariée au Portugal), il appartenait à la cour d’appel d’inviter l’URSSAF à mettre en œuvre la procédure de dialogue administratif entre les institutions compétentes en vue de la détermination de la législation applicable attestée par le formulaire appelé certificat A1, et, dans cette attente, de surseoir à statuer.

En conséquence, la cour d’appel qui reprochait au cotisant de ne pas avoir saisi l’organisme social à cet effet est censurée par la Cour de cassation.

Outre la solution inédite qu’il consacre, cet arrêt apporte l’intérêt pédagogique de sa motivation enrichie qui éclaire le justiciable et le praticien.

Procédure Civile

Appel civil- Acte d’appel – Mentions nécessaires – Appelant – Personne morale – Organe représentant légalement la société – Nécessité (non)

Civ.2, 21 décembre 2023, n°21-25603, publié au bulletin

Par cet arrêt de principe rendu au visa des articles 901, 57 et 54 du code de procédure civile dans leur rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, la deuxième Chambre civile a déduit de ces dispositions que dans sa déclaration d’appel, la partie appelante n’est tenue de désigner la personne morale contre laquelle la demande est formée que par les seules indications de sa dénomination et de son siège social.

Elle a donc censuré la cour d’appel qui pour déclarer son appel irrecevable avait retenu que l’appelante n’avait pas appelé à l’instance l’intimée représentée par sa représentante légale.

Autrement dit, pour la Cour de cassation, le défaut de mention dans la déclaration d’appel de l’organe qui représentait légalement une personne morale intimée ne peut être sanctionné par l’irrecevabilité de l’appel.

Il suffit que la déclaration indique la dénomination de la personne morale intimée et son siège social.

Cette solution vient consacrer une lecture fidèle des dispositions de l’article 57 qui n’exigent pas que l’acte d’appel précise que la personne morale intimée est représentée par son représentant légal.

Procédure civile – Incident de vérification d’écriture – qualification – moyen (oui) -prétention (non) – conclusions d’appel – recevabilité – article 910-4 cpc Procédure civile – incident de vérification d’écriture – obligation du juge de vérifier l’écrit contesté

Civ 2, 23 novembre 2023, n°21-19.666

Dans cet arrêt, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation juge, en premier lieu, et pour la première fois, que l’incident de vérification d’écriture par lequel une partie désavoue l’écriture ou la signature d’un acte que la partie adverse lui oppose constitue, non une prétention, mais une défense au fond.

Elle en déduit que l’incident soulevé en appel est recevable, même s’il n’est pas énoncé dans le cadre des premières conclusions mentionnées à l’article 905-2 du code de procédure civile, et ce, par application des articles 72 et 910-4 du code de procédure civile qui disposent respectivement que « les défenses au fond peuvent être proposées en tout état de cause » et qu’ « à peine d’irrecevabilité, relevée d’office les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond (…) », ce qui exclut les défenses au fond.

La Cour de cassation se réfère également dans son visa à l’article 954 du code de procédure civile qui exige que les prétentions des parties soient récapitulées sous forme de dispositif et précise que la cour d’appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

L’on peut donc déduire de cet arrêt que la cour d’appel est tenue de répondre à l’incident de vérification d’écriture, même s’il ne figure pas dans le dispositif des conclusions de celui qui l’invoque.

En second lieu, la Cour de cassation rappelle les obligations du juge en matière de vérification d’écriture, en les articulant avec le principe de la charge de la preuve.

Elle censure la cour d’appel qui, pour rejeter une demande de paiement fondée sur un manquement de l’assureur à son devoir d’information et de conseil, s’était fondée sur un écrit versé aux débats par l’assureur, que la société assurée contestait pourtant avoir signé, en retenant que les éléments produits par la société assurée ne permettaient pas d’établir que le signataire du document litigieux n’était pas le gérant de la société, ce d’autant plus que le cachet de la société était apposé.

Elle juge qu’il incombait à la cour d’appel de vérifier l’écrit contesté.

Autrement dit, elle rappelle que les juges du fond ne peuvent mettre à la charge de la partie qui soulève l’incident d’écriture la preuve de l’absence d’authenticité de la signature.

Arbitrage – compétence de la juridiction étatique – cas – convention d’arbitrage manifestement nulle ou inapplicable – exclusion (procédure arbitrale en cours lors de la saisine du juge étatique, peu important que le tribunal ait rendu sa sentence définitive lorsque le juge étatique statue)

Civ 1, 20 décembre 2023, n°22-23.935

L’article 1448 du code de procédure civile, applicable à l’arbitrage international en vertu de l’article 1506 du même code, dispose que « lorsqu’un litige d’une convention d’arbitrage est porté devant une juridiction de l’Etat, celle-ci se déclare incompétente, sauf si le tribunal arbitral n’est pas encore saisi et si la convention d’arbitrage est manifestement nulle ou inapplicable ».

Dans cet arrêt, la première Chambre civile de la Cour de cassation en déduit, de manière inédite, que la convention d’arbitrage ne peut être regardée comme manifestement nulle ou manifestement inapplicable par le juge étatique lorsque celui-ci, saisi alors que la procédure arbitrale était en cours, statue après que le tribunal arbitral a rendu sa décision définitive.

Elle précise que dès lors que le litige a fait l’objet d’une saisie préalable d’un tribunal arbitral, il appartient à ce dernier de statuer prioritairement sur sa compétence en ce compris pour se prononcer sur le caractère distinct du litige soumis à la juridiction française, et ce, peu important qu’une sentence définitive ait été rendue avant que le juge étatique ne se prononce.

Dans de telles conditions, la convention d’arbitrage ne peut être regardée comme manifestement nulle ou manifestement inapplicable. Le juge étatique est incompétent.

Arbitrage – convention d’arbitrage – clause compromissoire – désignation des arbitres – désignation par le juge d’appui – Excès de pouvoir – exclusion – cas

Civ. 1, 28 novembre 2023, n° 22-18.630, publié au Bulletin


Dans cet arrêt rendu en formation de section, la Cour de cassation a précisé les pouvoirs dont dispose le juge d’appui, en matière d’arbitrage interne, pour désigner un arbitre.

Elle a énoncé qu’il résultait des articles 1450, 1452 et 1460, alinéa 3, du code de procédure civile qu’il appartient au juge d’appui saisi de difficultés de constitution du tribunal arbitral, de désigner une personne physique en qualité d’arbitre sans qu’il lui soit permis de déléguer ce pouvoir à une personne morale.

Elle en a déduit qu’avait méconnu ses pouvoirs la cour d’appel qui avait déclaré irrecevable l’appel formé contre le jugement du juge d’appui aux motifs que ce dernier, qui avait désigné un centre d’arbitrage, n’avait commis aucun excès de pouvoir, alors qu’il ne pouvait que désigner une personne physique.

C’est la première fois que la Cour de cassation se prononce en ce sens, consistant à raisonner par analogie avec le mécanisme prévu par le second alinéa de l’article 1450 du code de procédure civile lorsqu’une convention désigne une personne morale, cette dernière étant alors chargée d’organiser l’arbitrage dans les conditions prévues par l’article 1452 du même code.

La possibilité de désigner une personne morale est donc réservée aux seules parties à la convention d’arbitrage.

Instance – Péremption

2ème Civ., 23 novembre 2023, n° 21-21.872, publié au Bulletin

La Cour de cassation rappelle dans cet arrêt que pour être interruptive de la péremption d’instance, une diligence doit être effectuée dans l’instance concernée par l’acte de péremption.

Elle en déduit que n’est, dès lors, pas interruptive de la péremption de l’instance en remboursement, engagée par la caution, le renouvellement d’une hypothèque provisoire effectuée par cette dernière.

Saisie immobilière – procédure – audience d’orientation – assignation – effet interruptif de prescription – durée – détermination – portée

Civ.2, 26 octobre 2023, n°21-12580, publié au Bulletin

Par cet arrêt de principe, la 2ème Chambre civile a apporté une précision s’agissant des effets de l’interruption du délai de prescription.

Elle a ainsi jugé qu’il résulte des articles 2241,2242 et 2244 du code civil qu’en matière de saisie immobilière, l’effet interruptif de la prescription attaché à la délivrance de l’assignation à comparaître à l’audience d’orientation consécutive à un commandement valant saisie immobilière produit ses effets, en l’absence d’anéantissement de ce commandement ou de cette assignation, jusqu’à l’extinction de la procédure de saisie immobilière.

Elle a précisé que l’effet interruptif produisait ses effets jusqu’au prononcé de l’arrêt de rejet de la Cour de cassation ayant mis fin à la procédure saisie immobilière, et non pas jusqu’à l’arrêt d’appel.

Il est vrai que celui-ci ne mettant pas un terme définitif à la procédure de saisie.

Mode de saisine des juridictions – recours contre une décision de recevabilité prise par la commission de surendettement – saisine par déclaration au greffe du tribunal judiciaire ou par lettre recommandée avec accusé de réception – état d’urgence sanitaire – absence de possibilité de saisir la juridiction par courriel

2ème Civ., 21 décembre 2023, n° 22-10.840

En vertu de l’article R. 722-1 du code de la consommation, le recours à l’encontre de la décision de la commission de surendettement des particuliers, portant sur la recevabilité de la demande de bénéficier des mesures de traitement déclinées au titre VII du code de la consommation, s’effectue par déclaration remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au secrétariat de la commission.

Au cours de la période d’état d’urgence sanitaire lié à l’épidémie de Covid 19, l’ordonnance no 2020-304 du 25 mars 2020, modifiée par l’ordonnance n°2020-427 du 15 avril 2020 a procédé à une prorogation des délais de recours mais, en aucune manière, n’a modifié les modes de saisine des juridictions.

Dans cette affaire, la Cour de cassation sanctionne donc le tribunal judiciaire qui a estimé recevable le recours d’un créancier contre une décision de la commission de surendettement présenté par courrier électronique en considérant que cette saisine pouvait être assimilée à une déclaration faite auprès du greffe.

Droit Public

Fonctionnaires et agents publics – positions – congés de maladie – accidents de service – placement de l’agent en CITIS – décision créatrice de droits – exception – administration ayant entendu placer l’intéressé en CITIS à titre provisoire

CE, 3 novembre 2023, req. n° 465.818, mentionné aux tables du recueil Lebon

Saisi pour la première fois d’un litige relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS), le Conseil d’Etat précise, comme le cabinet l’y invitait, que la décision accordant un tel congé qui vaut reconnaissance d’imputabilité au service, est créatrice de droit et ne peut être retirée que dans le délai de quatre mois pour cause d’illégalité, sauf si l’autorité administrative précise expressément que sa décision a un caractère provisoire dans l’attente d’une instruction plus poussée.

Enseignement supérieur et grandes écoles – Universités – organisation des études – sélection à l’admission en master lorsque les capacités d’accueil sont limitées – critères – mérite des candidats – absence de faculté de fixer d’autres critères – absence d’obligation de préciser les éléments d’appréciation de l’examen des mérites

CE, 13 octobre 2023, req. n° 467.671, mentionné aux tables du recueil Lebon

Par cet arrêt, le Conseil d’Etat a jugé que, par les deux premiers alinéas de l’article L. 612-6 du code de l’éducation, le législateur a entendu, lorsque les établissements fixent une capacité d’accueil pour l’accès à la première année de master et décident que l’admission des candidats est subordonnée soit au succès à un concours, soit à l’examen de leur dossier, que les seuls critères applicables soient ceux tenant aux mérites des candidats.

Ces dispositions n’imposent pas aux établissements de préciser les éléments d’appréciation selon lesquels les mérites des candidats sont examinés en vue de leur admission dans une formation de deuxième cycle dont la capacité d’accueil est limitée. Il leur est toutefois loisible d’y procéder.

Ainsi, les établissements sont tenus de définir le mode de sélection sans être tenus de définir les critères de sélection.

Le Conseil d’Etat s’est par ailleurs prononcé sur la publicité requise pour une délibération portant approbation des capacités d’accueil en master au titre d’une année universitaire.

A cet égard, il a jugé que la délibération publiée au recueil des actes administratifs de l’université, qui est accessible depuis la page « Présentation » du site internet de l’université, a fait l’objet d’une publicité suffisante pour permettre l’information des étudiants susceptibles de présenter leur candidature à l’admission dans ce master.